Ernst Jünger semblait indestructible. Blessé sept fois, combattant en première ligne dans les tranchées allemandes durant quatre longues années, il a survécu à la plupart de ses contemporains, en vivant jusqu’à l’âge de 102 ans.
L’expérience des Grandes Guerres laisse chez lui une marque indélébile, et inspire l’une des plus grandes œuvres de la littérature poilue, Orages d’acier (1920). Elle aiguise aussi un fort sentiment nationaliste, qu’il développe dans plusieurs revues de l’entre-deux-guerres.
Toute sa vie, il demeure un personnage ambigu en Allemagne, où on lui reproche ses accointances pour l’extrême droite. Car il fut proche du parti nazi jusqu’à 1933 et à l’arrivée d’Hitler au pouvoir. Insaisissable, il refuse les avances de Goebbels qui veut en faire un député du NSDAP.
Dans le même temps, il rédige Le Travailleur (1932), un livre aux relents antidémocratiques, exaltant la société technicienne. Durant la guerre, il sera au courant du complot contre le Führer sans jamais dénoncer personne, mais sans s’engager pour autant dans la Résistance. En 1939, il écrit Sur les falaises de marbre, un roman de fiction qui critique implicitement la dictature nazie.
Qui était donc Ernst Jünger ? Il se définissait comme un anarque, c’est-à-dire un personnage en retrait du politique, simple observateur en exil intérieur. Après la guerre, il renonce à son engagement militant et se retire dans le village de Wilflingen (Baden-Württemberg, Allemagne) où il vit proche de la nature, cultive son jardin et expérimente les paradis artificiels.
Source : France Culture