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Excuse pour les bouteilles d'Evian

La société du scandale permanent : le cas de l’eau d’Évian

La « société du scandale » est la phase terminale de la « société du spectacle », le moment où celle-ci, devenue sénile, épuisée d’elle-même, subclaquante, ne réagit plus qu’à des stimuli simplistes, des éructations médiatiques aussi violentes que dénuées de sens, mais qui seules parviennent encore à faire bouger quelque peu son corps débile. Dernier exemple en date : la tragi-comédie « Évian » ou quand inviter les gens à boire de l’eau minérale devient un drame national.

À chaque jour son nouveau « scandale », son nouveau « dérapage » suivi d’un nouvel « emballement » politico-médiatique. Pour occuper les Français confinés entre deux déclarations de leurs geôliers gouvernementaux, il est nécessaire de leur fournir à hautes doses du « drama », de l’agitation, du commentateur courroucé, de l’associatif révolté, du minoritaire diffamé, du diversitaire discriminé, des cris, des larmes, des menaces et des excommunications ! Une tâche à laquelle s’attelle avec une remarquable pertinacité le personnel journalistique, immanquablement soutenu par le monde des arts et de la culture, jamais en retard d’un haut-le-cœur citoyen.

Ce programme est d’ailleurs assez facile à réaliser tant nous vivons désormais entourés d’écorchés vifs de l’ego, de divas à la susceptibilité identitaire exacerbée que le moindre effleurement conduit à l’hystérie.

Et c’est ainsi qu’un message publicitaire diffusé sur les réseaux sociaux par une marque d’eau minérale peut devenir un affaire d’État, occupant davantage d’espace médiatique qu’une banale décapitation de professeur ou qu’un énième viol collectif en banlieue.

Une tempête dans une bouteille d’eau

Car, il convient de bien le retenir, en 2021, inviter les gens à boire de l’eau régulièrement dans la journée est devenu une abjecte et insupportable provocation islamophobe qui exige plates excuses, reptations et réparations. C’était bien la peine de nous bourrer le crâne pendant tant d’années avec la glorieuse « philosophie des Lumières » venue à bout de l’obscurantisme… Le progrès, c’est maintenant.

Donc, selon les contempteurs de cette « odieuse provocation », le service marketing de la société Évian serait en réalité un repaire d’odieux fachos islamophobes qui auraient sciemment fomenté une « cyber-agression » visant à humilier (une fois de plus !) la communauté musulmane de France en temps de ramadan. Ce plan machiavélique aurait bien entendu été validé par la hiérarchie de l’entreprise dont on ne serait pas surpris de découvrir qu’elle est abjectement et très largement « non-racisée ».

Qui peut honnêtement croire une seule seconde à un tel scénario, à part Gilles Verdez, le rantanplan de la bien-pensance ?

Mais peu importe la raison, la logique, la cohérence, le simple bon sens même, seuls comptent l’émoi, l’émotion, le brouhaha cybernétique et télévisuel offrant une nouvelle occasion de culpabiliser les uns et de victimiser les autres. Tout cela ne pourrait être que de grotesques et finalement risibles pantomimes, si, dans une société toujours plus éclatée et atomisée, ces itératifs faux scandales n’entretenaient pas dangereusement les ressentiments mutuels et, au final, la haine de tous envers tous.

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