ÉLÉMENTS : L’avenir de l’homme, c’est le populisme ?
OLIVIER MAULIN. Dans la séquence que nous traversons, qui se caractérise par une course à l’abîme menée par nos « élites », je pense en effet que le « populisme » est la seule manière de faire se cabrer les chevaux pour s’arrêter avant le précipice. Mais ce populisme, qui n’est à mon sens que le nom que l’on donne à la manière dont les peuples réagissent face à la catastrophe annoncée de leur disparition politique, ne peut être que transitoire. Il est fondamentalement une révolte, voire même un style de révolte, et n’est donc à mon sens que le moyen qui nous fera passer d’une séquence à l’autre, de l’ouverture à la protection si l’on veut résumer un peu grossièrement. Cette protection réclamée presque unanimement par les peuples européens prendra probablement différentes formes en fonction de l’histoire et du génie propre de chacun de ces peuples. Le populisme est donc l’avenir immédiat de l’homme, le seul capable d’éviter la mort, mais ce n’est pas un projet de civilisation.
ÉLÉMENTS : Nos adversaires, quel que soit le nom qu’on leur donne, libéraux, progressistes, productivistes, sont-ils déjà morts ?
OLIVIER MAULIN. Je crois qu’ils ont perdu la bataille des idées, qu’ils le savent pour les plus malins, et que cela les rend d’autant plus dangereux, un peu comme les fauves blessés et acculés. Du reste, on sait qu’il y a un décalage entre la victoire des idées et leur application dans le champ politique. Pour le moment on est dans une situation où les tenants du monde d’hier contrôlent encore tous le postes clés alors même que leurs idées perdent du terrain. Leur capacité de nuisance demeure ainsi énorme même, et surtout parce que la réalité leur donne tort à peu près tous les jours. Je crois donc qu’il ne faut être ni naïf ni trop optimiste, d’autant que certains sont aujourd’hui prêts à tout truquer et à tout falsifier pour tenter de faire rentrer le réel dans leur logiciel. On l’a encore vu récemment avec l’attaque place de la République d’un transsexuel par des Algériens manifestant contre Bouteflika. Les images montraient des agresseurs enroulés du drapeau algérien, mais les médias se sont insurgés à l’unanimité contre la scandaleuse homophobie des Français ! Ce n’est plus d’interpréter les faits que nous reprochent aujourd’hui nos adversaires mais simplement de les rapporter. C’est un bon signe pour la vitalité de nos idées, bien sûr, mais c’est aussi très inquiétant, car on ne peut pas exclure une dérive totalitaire de notre démocratie, un totalitarisme qui ne prendrait évidemment pas les traits de ceux du XXe siècle…
ÉLÉMENTS : Le déclin du courage c’est le début du déclin, dit en substance Soljenitsyne. Dans ce livre, vous prenez tous les risques. Le courage nous sauvera-t-il ?
OLIVIER MAULIN. Vous savez, j’ai un peu fréquenté les salons du livre et autres manifestations culturelles littéraires et ce qui m’a toujours frappé, c’est le nombre de « marranes » qui, après des débats convenus où ils donnaient des gages au politiquement correct, m’avouaient autour d’une bière penser exactement la même chose que moi. Il y avait vraiment un côté soviétique dans ces salons ! Tout tient par la culpabilisation et l’autocensure. Mais quand la possibilité d’être reconnu et de vendre ses livres passe par ces gages donnés à ce petit milieu vérolé, il est difficile de jeter la pierre à ceux qui courbent ainsi l’échine. Ce règne du faux ne tient cependant plus qu’à un fil et si les « marranes » décidaient tous de tomber les masques, cela renverserait la table ! En attendant, espérons qu’une échappée individuelle, une charge de cavalerie pour l’honneur, pourra faire sortir un autre cosaque du rang, et puis un autre, et puis encore un autre ; à la fin c’est une armée des ombres qui se dressera face au mensonge ; celui-ci s’effondrera alors dans la seconde.
Le populisme ou la mort, Olivier Maulin, éditions Via Romana, 292 p., 24 €.
RDV le jeudi 11 avril à 18 h à la Nouvelle Librairie, 11 rue de Médicis, 75006 Paris.