Quel paradoxe… Depuis que les progressistes ont chassé le diable et qu’ils l’ont relégué, avec la superstition, dans les enfers auxquels ils ne croient pas, ils le voient partout. Pour des esprits éclairés par les Lumières, c’est doublement déconcertant… On pourrait pourtant les diviser sans peine en deux catégories : les grands inquisiteurs et les grands exorcistes, preuve de leur dévotieuse catholicité, quoi qu’ils en aient (ils l’ont rebaptisée « universalisme » sans savoir de quoi ils parlent, comme d’habitude.)
Pour leur répondre, Jean-Yves Le Gallou, démon de très haut grade que les docteurs de la Loi les plus érudits situent parmi les fauteurs de scandales, dans la neuvième fosse du huitième cercle de l’Enfer de Dante qui, pour mémoire, en compte neuf, a choisi la meilleure arme qui soit : le poignard. En grec, cela se dit enchiridion, et cela se traduit par « manuel » parce qu’un gentilhomme a toujours l’un et l’autre « sous la main », comme en atteste depuis dix-neuf siècles le Manuel d’Epictète. C’est donc dans cette tradition vénérable que s’inscrit l’auteur du Manuel de lutte contre la diabolisation, vade-mecum bien affuté, tranchant comme un rasoir : les plus rébarbatifs sermons de nos cagots ne repoussent pas.
Jean-Yves Le Gallou, en adepte de la double lame, pointe les immenses territoires, les vastes étendues où s’exerce la juridiction des Chérubins guidés par George Soros, puis il retourne leur épée de plomb contre eux.
Racisme, sexisme, écologisme, immigrationnisme : il est des domaines où les sectateurs de la libre-pensée refusent tout droit au blasphème, lequel semble pourtant gravé dans le marbre démo-libéral, il est vrai aussi plastique et mouvant que la fenêtre d’Overton dont la propagande, la censure et l’ostracisme posent les rails coulissants pour dénigrer et réduire au silence « l’ennemi » : « l’homme fidèle à ses racines ethniques, culturelles, historiques, religieuses ». Jean-Yves Le Gallou, à la suite de Laird Wilcox, énumère les vingt-et-un outils dont disposent les trois bricoleurs pour faire passer le maudit libertin de vie à trépas ainsi que les myriades de petites mains ou de gros bras qu’ils ont en apprentissage.
Face à eux, la riposte, la résistance sans provocation ni concession, la solidarité, l’étude, le rire, la liberté, la transgression, la démystification, le courage et, conformément à l’esprit des meilleurs Poignards et Manuels, « l’énergie morale, la force d’âme, la maîtrise de soi [qui] se situent au cœur de l’enseignement des stoïciens ». Le bretteur a-t-il relu Cyrano de Bergerac ? A la fin de l’envoi, il touche.